Reconnaître l’État palestinien ? C’est beau à dire. Macron le promet pour septembre, devant l’ONU. Jacques Frantz y voit un simple numéro de diplomatie, un coup de com’ sans conséquences.
Emmanuel Macron a annoncé sur X son intention de reconnaître l’État palestinien lors de l’Assemblée Générale de l’ONU en septembre.
Une fois n’est pas coutume, c’est Donald Trump qui a, selon moi, trouvé la bonne formule : « Cette reconnaissance n’a aucun poids. »
C’est vrai, ça ne mange pas de pain. Ça ne résoudra absolument rien sur le terrain, car si c’est pour livrer des armes en douce à Israël, et même si tout le monde sait que le cynisme n’a pas de limite, il ne faut regarder cet événement que comme une tempête dans un verre d’eau et un énième coup de com’.
C’est bien connu, tout ce que dit et fait Macron est vicié. D’ailleurs, pour l’heure, Macron a dit mais n’a encore rien fait. Il a dit qu’il allait faire, mais va-t-il faire ? Pourvu qu’il fasse dans un endroit approprié. Justement, comme pour donner de la solennité à tout ça, la reconnaissance officielle interviendra à l’Assemblée générale des Nations Unies. Si Macron n’avait pas besoin d’une grande scène digne de lui, Macron ne serait pas Macron. Et puis il peut se passer tellement de choses d’ici septembre…
En premier lieu, il convient d’analyser l’impact. Pour les Palestiniens, soyons clairs, l’impact est nul. Ça n’arrêtera pas le génocide en cours à Gaza, pas plus que celui en préparation en Cisjordanie. Pour Israël, guère plus. Certes, ça vocifère beaucoup, ça s’indigne, ça crie et ça pleure, mais dans le fond, ce qui peut bien se faire au niveau international chaut peu à l’État hébreu. Les résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale de l’ONU, le mandat d’arrêt émis par le tribunal pénal international de La Haye… tout cela glisse sur Netanyahu et sur ses prédécesseurs comme l’eau sur les plumes d’un canard.
Bien sûr, tout cela est chargé de symboles. Et une reconnaissance de l’État palestinien par la France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, en est un, et pas des moindres. Comme quoi, le siège permanent de la France au Conseil de sécurité est tout de même utile, ce qui vaut d’être mentionné au passage à l’intention des destructeurs qui, pour fondre toujours davantage la France dans le magma européen, rêvent de voir cette dernière brader son siège à l’Union européenne. Même si — rappelons-le — tout ça n’est que symbolique et ne changera strictement rien d’un point de vue politique ou juridique, l’aspect symbolique ne saurait être négligé.
Il n’en va pas de même en politique intérieure. Depuis le 7 octobre 2023, ce qui se passe en Palestine occupée constitue pour l’extrême gauche en France un véritable boulevard. Un boulevard dans lequel tout le reste de la classe politique a beaucoup hésité à s’engouffrer, se mettant ainsi en porte-à-faux avec la population, qui supporte assez mal les images des massacres israéliens. Il était donc temps pour Macron de recoller, et de recoller à l’opinion.
Les choses se compliquent aussi d’un point de vue juridique. Si, pour la France, la Palestine est un État, force est de constater que c’est un État occupé. Après l’esbroufe et les effets d’annonce, il va falloir réfléchir à quelles frontières la France reconnaît-elle pour cet État. Sont-ce les frontières de 1967 ? Ou sont-ce les frontières dessinées par le gendre de Trump lors de son premier mandat ? Quoi qu’il en soit, si — ce qui n’est toujours pas fait et donc qui demeure incertain — la France reconnaît l’État de Palestine, elle devra prendre à l’encontre de l’occupant israélien les mêmes mesures punitives qu’elle a prises avec beaucoup de zèle contre l’occupant russe en Ukraine.
Je ne puis croire un seul instant qu’un grand pays comme la France s’abaisserait au « deux poids, deux mesures ». Je peux me tromper, bien sûr. Dieu sait qu’on se trompe beaucoup lorsqu’on envisage l’avenir. Cependant, je serais prêt à mettre une petite pièce sur le fait que ça ne se fera pas. Que Macron compte sur un événement permettant de reporter cette reconnaissance, comme il l’a fait en juin.
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