L’UE lance un plan de 200 milliards d’euros pour l’IA

Face à la domination technologique des États-Unis et de la Chine, l’Union européenne dévoile un plan de 200 milliards d’euros pour développer l’intelligence artificielle, misant sur des infrastructures massives, des données centralisées et un encadrement réglementaire allégé.
La Commission européenne a présenté le 9 avril un vaste plan de 200 milliards d’euros destiné à relancer l’intelligence artificielle sur le continent. Ce « AI Continent Action Plan » vise à construire cinq « gigafactories » dotées chacune de 100 000 puces IA, un équipement stratégique censé fournir la puissance de calcul nécessaire au développement de modèles avancés.
Le financement initial, à hauteur de 20 milliards d’euros, sera réparti entre les États membres et la Commission. L’objectif est d’implanter ces infrastructures critiques d’ici cinq à sept ans, en parallèle d’un triplement de la capacité de données du continent. Aujourd’hui, l’UE héberge seulement 18 % des centres de données mondiaux, dont seulement moins de 5 % sont contrôlés par des acteurs européens, selon l’Institut Montaigne.
Centralisation des données et dépendance accrue
Le plan prévoit également la création de « laboratoires de données » à proximité des usines d’IA. Ces structures devront rassembler et organiser de grands volumes d’informations, indispensables à l’entraînement des modèles. Bruxelles insiste sur le respect des règles de protection des données, mais les experts soulignent que le Règlement général sur la protection des données entré en vigueur en 2018 freine l’innovation et limite l’accès à des données de qualité.
Sur le plan humain, la Commission tente de répondre à l’exode des chercheurs européens vers les États-Unis. Des académies spécialisées, des programmes de bourses et des voies migratoires facilitées seront mis en place pour attirer les talents étrangers et inciter les experts européens à revenir. Le Point rappelle que l’UE dispose de la plus forte densité de chercheurs en IA au monde, mais qu’elle peine à les retenir.
Règlementation allégée pour favoriser les entreprises américaines
Pour expliquer ce retard technologique, la Commission pointe un taux d’adoption de l’IA très faible : seulement 13,5 % des entreprises européennes en 2024, selon Eurostat. Une stratégie baptisée « Appliquer l’IA » sera présentée prochainement pour encourager l’utilisation de ces technologies dans les secteurs clés comme la santé, l’automobile ou l’énergie.
En parallèle, Bruxelles cherche à simplifier sa réglementation. L’AI Act, adopté en 2023, n’est toujours pas pleinement appliqué. Un guichet unique, le « AI Act Service Desk », sera créé pour aider les entreprises à s’y conformer.
Ce plan intervient alors que les États-Unis ont lancé Stargate, un projet évalué à 500 milliards de dollars impliquant OpenAI, Microsoft et Nvidia. La Chine, quant à elle, progresse malgré les restrictions occidentales sur les puces. L’Union européenne tente donc de réagir, mais avec un modèle toujours autant centralisé et bureaucratique. Comme l’écrit Forbes, « le succès dépendra de la rapidité et de la coordination de l’exécution ». Des conditions rarement réunies à Bruxelles.