Marine Le Pen face à son destin judiciaire : entre confiance et dénonciation

À la veille du verdict du 31 mars dans l’affaire des assistants parlementaires du Rassemblement national, Marine Le Pen se montre sereine. Refusant de céder à la «fébrilité», elle dénonce une possible peine d’inéligibilité comme une atteinte à la démocratie, tout en promettant de résister.
À l’approche du jugement décisif du tribunal correctionnel de Paris, prévu le 31 mars, Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement national (RN) à l’Assemblée nationale et candidate naturelle du parti pour l’élection présidentielle de 2027, se trouve à un tournant de sa carrière politique. Poursuivie dans le dossier des assistants parlementaires d’eurodéputés RN, elle risque une peine de cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire, assortie de cinq ans de prison (dont deux ans ferme aménageables) et 300 000 euros d’amende. Pourtant, la triple candidate à la présidentielle se veut confiante, affirmant dans La Tribune Dimanche : «Je ne crois pas qu’ils iront jusque-là.»
Une candidate sereine mais menacée
Cette sérénité affichée contraste avec la gravité des réquisitions prononcées en novembre 2024 par le parquet. L’exécution provisoire, qui rendrait la peine applicable immédiatement même en cas d’appel, pourrait l’exclure de la course à l’Élysée en 2027. Une perspective que Marine Le Pen rejette avec vigueur, y voyant une menace pour la souveraineté populaire. «Si je suis interdite de me présenter avec exécution provisoire, c’est-à-dire avec l’impossibilité en réalité que mon appel puisse avoir une influence sur la décision qui a été prise, ce serait incontestablement une décision profondément antidémocratique», a-t-elle déclaré récemment. Pour elle, une telle issue ne serait pas seulement un coup porté à sa personne, mais une atteinte au droit des Français de choisir leurs représentants.
Dans cette affaire, où elle est accusée d’avoir orchestré un système de détournement de fonds européens, Marine Le Pen oscille entre optimisme et critique acerbe du système judiciaire. «Je lis ici et là que nous serions fébriles. Personnellement, je ne le suis pas, mais je comprends qu’on puisse l’être : avec l’exécution provisoire, les juges ont un droit de vie ou de mort sur notre mouvement», a-t-elle confié. Ces mots traduisent une double posture : une assurance personnelle face à l’épreuve, mais aussi une reconnaissance implicite de l’inquiétude qui gagne ses soutiens.
En qualifiant une potentielle inéligibilité de «profondément antidémocratique», Marine Le Pen pose les bases d’un recours en appel et d’une bataille politique, quelles que soient les conclusions du tribunal.
Cette rhétorique trouve un écho chez ses adversaires à gauche, qui dénoncent un hypothétique traitement d’exception. Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, a ainsi tranché sur LCI : «La loi s’applique à Marine Le Pen comme à moi, comme à toutes celles et ceux qui font de la politique et qui ne sont pas au-dessus des lois.»
Je ne comprends pas le regard particulier que nous portons à Marine Le Pen sur la question de son inéligibilité. Depuis quand se déclarer candidat à la présidentielle exempte-t-il de sa peine ? Que l’on soit puissant ou misérable, les jugements doivent être rendus de la même… pic.twitter.com/Vae77lCy0c
— Olivier Faure (@faureolivier) March 29, 2025
Fabien Roussel, du Parti communiste français, a renchéri dans Ouest-France : «Je ne vois pas pourquoi madame Le Pen devrait bénéficier d’une exemption à la loi.»
À la croisée des chemins, Marine Le Pen attend donc ce verdict avec une détermination intacte. Si elle échappe à l’inéligibilité, elle renforcera son statut de résistante face à ce qu’elle nomme une justice instrumentalisée. Dans le cas contraire, son appel et sa dénonciation d’un système partial promettent une nouvelle lutte, où elle entend bien transformer une défaite judiciaire en victoire politique.