C’est la clôture d’une séquence lamentable, dont il y a fort à parier qu’elle a été mise en scène depuis le début. Un billet d’humeur d’Alexandre Regnaud, qui dénonce la grossièreté de la manipulation et ses graves conséquences.
Il y a bien entendu eu tout le cirque médiatique au moment du prononcé de la peine de prison ferme. On a tout entendu, de l’absence de preuve à une vengeance des juges, particulièrement hostiles à un ancien président de la République, avocat de profession, qui leur vouait une inimitié réciproque et qui le faisait savoir.
C’était oublier la gravité particulière des faits reprochés, leurs implications géopolitiques immenses, et surtout, le fait que l’ex-président n'en était pas à sa première condamnation, y compris définitive. On repassera pour la démonstration de probité.
Mais ce qu’avait de plus dérangeante la musique qui se jouait sur les plateaux de télévision était finalement de sous-entendre qu’en tant qu’ancien président, Sarkozy n’était pas un citoyen ordinaire, et donc ne devait pas être jugé comme tel.
Or, il ne semble pas que la France ait rétabli les privilèges depuis l’Ancien régime, mais même, bien au contraire, que ce qui devrait distinguer un ancien président d'un citoyen dit « ordinaire » (pléonasme…), est justement son devoir d’exemplarité. On en est bien loin.
Il y a ensuite eu la visite à Macron avant l’incarcération, la visite de Darmanin, ministre de la Justice et lui-même ancien sarkozyste, pendant l’incarcération. Tout un système qui se concerte et s’entend.
Également, la cellule spéciale avec les gardes du corps, montrant donc que la sécurité du justiciable ne va pas de soi dans un établissement pénitentiaire en France. Fait illustré par les nombreuses vidéos de menaces filmées et mises en ligne par ses co-détenus avec leurs téléphones, qui sont bien entendu interdits en prison… très théoriquement donc. Un résumé involontaire sans doute, mais très parlant, d’une faillite française supplémentaire.
Puis vint la mise en scène récente des yaourts. La presse (toujours elle) qui relaie complaisamment la fable de Sarkozy-Causette, qui ne mangerait donc que des yaourts en prison, parce qu’il a peur qu’on ait craché dans sa pitance (mais pas dans son Yop…) et qu’il ne sait rien se préparer lui-même. Au-delà de souligner l’indignité d’un homme incapable d’autonomie mais prétendant diriger un pays entier, et habitué donc à être servi, ce qui en dit déjà long en terme de mentalité, on a surtout une magnifique opération psychologique de préparation des esprits à quelques jours de l’examen de sa demande de mise en liberté provisoire, donc de sa sortie de prison.
Une sortie plus que rapide, au final après à peine quelques jours d’incarcération, et sans doute planifiée depuis le début. Pourquoi cette mise en scène complexe alors ?
Le fait est qu’il fallait mettre Sarkozy en prison. Le pays est au bord de la rupture moralement, économiquement, socialement, la liste est longue. Il fallait donner une victime expiatoire pour calmer un peu la plèbe. Alors que la justice innocente toujours les puissants et les vrais délinquants pour ne se montrer impitoyable que face aux erreurs ponctuelles des honnêtes citoyens, aux opposants à la macronie et autres Gilets jaunes, il fallait lâcher un peu de lest et montrer que, parfois, les puissants aussi peuvent aller en prison.
Sarkozy était la victime expiatoire parfaite, symbolique et très clivante. Un très bon plan de relation publique pour lui, le remettant pleinement sur le devant de la scène et lui permettant de jouer les martyrs et de compter ses soutiens. Un très bon plan pour Macron, transférant (très temporairement) son impopularité record sur quelqu’un d’autre. Du gagnant-gagnant pour le Système. Il était évident dès le début que l’incarcération serait levée à la première occasion. Et la justice là-dedans, bien entendu, n’est qu’un pion, et son indépendance une vaste blague.
Une situation d’autant plus révoltante qu’en focalisant l’attention sur cet accessoire, on empêche que soit pris en compte l’essentiel : la corruption désormais démontrée du système politique français à son plus haut niveau, les répercussions géopolitiques sur des milliards de vie, en Europe, en Afrique, au Moyen-Orient, sans que personne n’en rende compte, l’instrumentalisation de la chose publique, des médias et des institutions à des fins personnelles, etc.
Alors que la farce de l’incarcération a été mise en scène pour en détourner le public, sa grossièreté doit au contraire servir de révélateur et de prise de conscience. Ils vous prennent ouvertement pour des imbéciles, et cela se déroule très concrètement, sous vos yeux, avec tout ce que cela dit de l’état de ce pays et de ses élites. Ne vous laissez pas duper !
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