Sanctions européennes : les médias russes encore trop visibles, selon un think tank britannique

Selon l’Institute for Strategic Dialogue, un think tank atlantiste, l’application des sanctions de Bruxelles à l’encontre des médias russes laisseraient à désirer. D'après une de ses «enquêtes» parue le 5 août, les sites de Ria Novosti, de Lenta ou encore de RT cumuleraient des millions de visites uniques chaque mois.
« Trois ans après les restrictions initiales, les médias sanctionnés sont encore largement actifs et accessibles dans tous les États membres ». Dans une « enquête » parue le 5 août, et sobrement intitulée « Tenir la ligne : Audit de l'interdiction des médias d'État russes par l'UE, trois ans après », le think tank londonien Institute for Strategic Dialogue (ISD) s’est penché sur la visibilité au sein des 27 des médias russes sanctionnés par Bruxelles.
Une visibilité – pour certains sites – manifestement encore trop grande au goût de ce « laboratoire d’idées » financé notamment par The German Marshall Fund ou encore l’Open Society Foundations. « Sur les 58 domaines recensés, 10 comptaient entre un et dix millions de visiteurs uniques mensuels », a notamment relevé l’ISD, soulignant de fortes disparités : « 13 sites web comptaient moins de 1 000 visiteurs mensuels ».
Au titre des sites d’information russes les plus consultés au sein de l’UE, RIA Novosti remporte la médaille d’or, avec 10,2 millions de visiteurs, suivi de près par Lenta et ses 9,5 millions de visiteurs uniques mensuels. RT, avec 5,7 millions de visiteurs, ferme le podium. Point notable – et dont RT pourrait visiblement s’enorgueillir, selon l’ISD –, notre site, ainsi qu’une quinzaine d’autres, jouirait d’un faible taux de « rebond » par rapport aux autres sites d’informations sanctionnés par Bruxelles, « ce qui témoigne d'un très bon taux de rétention des utilisateurs ».
Nombre de visites : les Allemands creusent l’écart
Toujours en matière d’audience, l’ISD a également constaté des disparités suivant les six pays d’où se connectaient les lecteurs : à savoir l’Allemagne, la France, l’Italie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie. Nettement en tête de ce classement : l’Allemagne et son « intrigante russophilie » à l’est du pays.
D’après les chiffres de l’ISD, cinq sites russes y seraient ainsi visités plus de 50 000 fois par mois, et 34, près de 1 000 fois. Rien à voir avec l’Italie, où ce sont 45 sites qui seraient consultés environ 1 000 fois par mois et quatre sites qui enregistreraient entre 10 000 et 30 000 visites mensuelles.
« On ignore si cela est dû à un manque d'application de la part des fournisseurs d’accès internet (FAI) ou à l'utilisation d'outils par les utilisateurs pour contourner les restrictions, tels que les réseaux privés virtuels (VPN) ou la modification de la configuration DNS de leurs appareils », peut-on lire dans cette « enquête » de l’ISD.
Car, paradoxalement, en matière d’application des blocages, les principaux FAI allemands, avec leurs homologues français, sont ceux ayant été salués par le think tank « en matière d'application de la loi ». À l’inverse, la Slovaquie aurait ainsi « obtenu les pires résultats », car « tous les domaines sanctionnés étaient accessibles auprès des trois principaux FAI du pays ».
Blocage des sites : les FAI slovaques et polonais pointés du doigt
Plus surprenant, la Pologne figurait également parmi les cancres, aux regards des critères de l’ISD avec « au moins 50 domaines sur 59 » accessibles. Un effet passoire qui reflèterait, d’après les auteurs de l’enquête, des « lacunes techniques, politiques et juridiques ».
Appelant à « automatiser plus efficacement la détection et la modération de ces contenus », l’ISD recommande notamment à la Commission européenne de « soutenir et coordonner les organisations de la société civile » au sein des États membres afin de mieux « repérer les comptes prorusses » sur les réseaux sociaux qui « pourraient servir d’amplificateurs aux médias sanctionnés ».
Il est également suggéré à la Commission d’ « établir et tenir à jour » la liste des domaines sanctionnés, voire de les inclure dans les paquets de sanctions « officiels ». Du côté des États membres, le think tank suggère de recourir au levier judiciaire pour contraindre les FAI « à remplacer ou à compléter les mécanismes de blocage ».