Selon le Washington Post, l’accord entre les États-Unis et l’Ukraine sur les minerais se heurterait à des obstacles majeurs

Présenté par Washington comme une contrepartie aux milliards d’aides versés à Kiev depuis 2022, l’accord sur l’exploitation des ressources ukrainiennes devait réduire la dépendance des États-Unis à la Chine pour les minerais stratégiques. Mais selon The Washington Post, le projet fait face à de lourds obstacles difficilement contournables.
Selon The Washington Post, l’accord sur les terres rares signé entre les États-Unis et l’Ukraine fin avril visait à offrir à Washington un retour sur ses dépenses militaires et financières engagées en soutien à Kiev depuis 2022. Le principe est simple : les profits issus de l’exploitation des minerais stratégiques ukrainiens, comme le titane, le lithium ou le graphite, serviraient de compensation. L’idée, lancée par Donald Trump, évoquait plusieurs centaines de milliards de dollars de terres rares. Pourtant, d’après les experts cités par le journal américain, « l’Ukraine ne produit pour le moment pas de terres rares et n'en produira probablement pas de sitôt ».
Un terrain inexploitable pour les grandes entreprises
Les défis techniques et économiques rendraient la mise en œuvre de cet accord hautement improbable. Toutes les cartes géologiques disponibles datent de l’époque soviétique, aucun travail de prospection moderne n’a été mené depuis plus de 35 ans. Toujours selon The Washington Post, les grandes entreprises minières ne souhaitent pas investir dans un pays en conflit où les infrastructures sont détruites. Ashley Zumwalt-Forbes, ancienne responsable au ministère américain de l’Énergie, résume : « Nous avons déjà du mal à lever des fonds pour explorer aux États-Unis, au Canada ou en Australie. Imaginez la difficulté en Ukraine ». L’analyste Abigail Hunter souligne en outre que le gisement de lithium le plus prometteur ne se situe désormais plus en Ukraine, mais en Russie, rendant toute exploitation illusoire.
Pas de traitement, pas d’exportation, pas de bénéfices
Même si les matières premières étaient extraites, leur traitement resterait un problème majeur. The Washington Post cite Emily Holland, professeur au Naval War College, selon qui « le traitement des minerais est plus problématique que l’extraction elle-même », car il nécessite une infrastructure lourde, aujourd’hui absente. Elle ajoute que l’accord ne prévoit aucune installation de traitement, et que la transformation des ressources en Ukraine « n’est pas du tout adaptée aux besoins industriels des États-Unis ». Ces réserves de terres rares étant situées dans une zone de conflit, les grandes compagnies refuseraient d’y investir. Ben Cahill, de l’université du Texas, estime que seules de petites entreprises pourraient prendre ce risque, mais sans garantie de succès.
Malgré la propagande médiatique autour de cet accord, les faits évoqués dans The Washington Post dressent un tableau sans appel : aucune ressource stratégique ne sera exploitée à court ou moyen terme, aucune chaîne d’approvisionnement ne sera renforcée, et aucun retour sur investissement ne semble donc envisageable. Cet accord, voulu comme une forme de remboursement face aux milliards fournis par Washington à Kiev, mais également comme une réponse américaine à la domination chinoise sur les minerais critiques, apparaît aujourd’hui comme un pari hautement risqué.