France : la justice autorise le confinement définitif des déchets toxiques sur le site de Stocamine

Les recours introduits par la Collectivité européenne d’Alsace et l’association Alsace Nature ont été rejetés par le tribunal administratif de Strasbourg. Les deux organismes ont mené une campagne juridique pour empêcher l’enfouissement de 42 000 tonnes de produits toxiques pouvant menacer sérieusement de contaminer la nappe phréatique alsacienne.
Le tribunal administratif de Strasbourg a rendu sa décision, ce 17 juin, sur le confinement définitif des 42 000 tonnes de déchets hautement toxiques sur le site de stockage des anciennes mines de potasse d’Alsace à Wittelsheim, dans le Haut-Rhin. Les produits en question comprennent, entre autres polluants, de l’arsenic, de l’amiante, du chrome, des résidus d’incinération, etc.
Les recours introduits par la Collectivité européenne d’Alsace (Bas-Rhin et Haut-Rhin) et l’association Alsace Nature, ont été rejetés par le tribunal, selon lequel il n’était désormais plus possible de les retirer « dans des conditions acceptables de sécurité pour le personnel et de risques pour l’environnement », en raison de la dégradation des galeries où sont stockés les déchets à plus de 500 mètres sous terre. « Dès lors que le déstockage n’est plus possible », estime le tribunal, seul le confinement définitif « constitue désormais, en l'état des meilleures techniques disponibles, la mesure la plus susceptible de préserver la ressource en eau et par suite le droit des générations futures à satisfaire leurs propres besoins », a-t-il conclu.
La bataille juridique n’est pas terminée
Le dossier de ces déchets toxiques oppose l’État, qui soutient la mesure de confinement, aux collectivités locales et associations environnementales depuis 2002. Selon la presse française, ces déchets menacent à long terme la nappe phréatique d’Alsace, qui est la plus grande d’Europe, alimentant plus de cinq millions de personnes en eau potable des deux rives du Rhin.
L'autorisation d'entreposer les déchets toxiques devait être temporaire, mais l'État, par un arrêté de la préfecture du Haut-Rhin datant du 28 septembre 2023, a porté l'autorisation de stockage à une durée illimitée sur un site géré par la société des Mines de potasse d'Alsace (MDPA), détenue à 100 % par l'État. Un vaste chantier a été entamé pour couler des barrières de béton dans les galeries souterraines.
Le coup d’envoi du chantier de confinement devait se faire en 2020 pour une durée de trois ans. Or, les travaux n’ont commencé qu’au printemps 2024 et devaient s’achever en 2027, avant d’être suspendus. Passé cette date, le tribunal administratif considère que les conditions de sécurité ne seront plus réunies pour intervenir, explique la presse.
Le rapporteur public, Alexandre Therre, qui est pour la poursuite des travaux de confinement, a estimé que la « dégradation très significative » des galeries, où « les toits s'affaissent et les murs se rapprochent », empêchait l’extraction sans risques des déchets.
La bataille juridique devrait encore se prolonger dans la mesure où Alsace Nature, une fédération d'associations alsaciennes œuvrant en faveur de la protection de l'environnement, a indiqué son intention de faire appel de la décision devant la cour administrative d’appel de Nancy.
La France Insoumise refuse « un jugement qui sacrifie l’avenir »
Le parti de gauche, La France Insoumise (LFI) s’est insurgé contre ce jugement par voie de communiqué rendu public sur X ce 17 juin. « Ce jugement entérine un fait accompli au mépris de l'environnement, de la santé publique et des alertes répétées des citoyen.nes et de la communauté scientifique. Lors de l'audience, le rapporteur public lui-même a reconnu les manquements graves de l'État, notamment les incertitudes persistantes sur la nature exacte des déchets enfouis et leur toxicité réelle », lit-on dans le communiqué.
🔴📄 Suite au rapport accablant de l'Igas sur les crèches « La Maison bleue », nous demandons un débat sur les conclusions de la commission d'enquête sur le business des crèches privées.
— La France Insoumise #NFP à l'Assemblée (@FiAssemblee) June 17, 2025
Rappellons qu'Aurore Bergé est visée par une enquête pour "faux témoignage" parce qu'elle… pic.twitter.com/ud7IhGjzD7
Déplorant « profondément cette décision », LFI a alerté : « l'enfouissement définitif constitue une véritable bombe à retardement pour les générations futures et ouvre la voie à une pollution irréversible de la plus grande nappe phréatique d'Europe ». Pointant « l'irresponsabilité de l'État en matière de protection de l'environnement » et face à « l'urgence écologique », LFI a appelé à « défendre nos biens communs et refuser que l'avenir de nos enfants soit sacrifié » et a conclu en proposant de « renforcer les outils juridiques et institutionnels afin d'assurer une protection effective de l'environnement, pour qu'il n'y ait plus jamais de Stocamine ».
Le député LFI du Bas-Rhin Emmanuel Fernandes a pour sa part déclaré : « il n’est pas normal que la justice soit mise devant le fait accompli ».
Même son de cloche du côté de François Zind, l’avocat d’Alsace Nature, qui a déclaré : « Nous n’acceptons pas de donner en héritage ces produits toxiques aux générations futures ».