Mayotte : examen en commission à l’Assemblée du projet du gouvernement pour «refonder» l’archipel

Adopté largement par le Sénat à la fin mai, ce texte, très attendu dans un département ravagé par le cyclone Chido, six mois auparavant, sera examiné en commission à l’Assemblée nationale. Il porte sur les grands enjeux du département et implique près de quatre milliards d’euros d’engagements financiers de l’État.
Après environ six mois du passage ravageur du cyclone Chido à Mayotte, le gouvernement français examine enfin, ce 10 juin, le projet de loi-programme en commission à l’Assemblée nationale, qui devrait « refonder » ce territoire d’outre-mer, considéré comme le plus pauvre de France. Le texte avait déjà été largement adopté au Sénat à la fin mai dernier, suscitant de nombreux débats portant notamment sur les volets migratoire et sécuritaire.
Le projet de loi devrait être débattu au sein de l'hémicycle à partir du 23 juin prochain. En attendant, c’est aux députés de la commission des lois d'entamer son examen avec l'audition du ministre des Outre-mer, Manuel Valls, prévue dans l’après-midi.
« Retard abyssal »
Le projet de loi, très attendu par les Mahorais, aborde plusieurs problèmes dans le département, dont certains sont bien antérieurs aux ravages du cyclone. Entre autres dossiers, le texte s’attaque au problème de l’eau, de l’éducation, de la santé et des infrastructures. Des volets plus controversés y sont également débattus portant notamment sur les problèmes sécuritaires et migratoires. Il implique également un engagement financier de l’État à hauteur de quatre milliards d’euros.
Cité par l’AFP, Philippe Vigier, député MoDem et rapporteur général du texte, a déclaré qu’« il y a un retard abyssal, mais des potentialités extraordinaires, et je considère qu’avec ce plan très ambitieux, c’est un véritable acte de reconnaissance fait à ce territoire ».
Un texte qui restreint « les libertés publiques, le droit des personnes immigrées »
Plus incisif, Aurélien Taché, député de La France Insoumise (LFI) a fustigé certains points du projet de loi. « On nous avait promis une loi pour refonder Mayotte, mais c’est encore aux antipodes de ce qui devrait être fait pour que Mayotte soit considérée comme un département à part entière », s’est-il insurgé auprès de l’AFP, ajoutant qu’« elle ne va pas rattraper le développement économique et social […] mais restreindre davantage les libertés publiques, le droit des personnes immigrées, mais aussi des Mahorais ».
Cette position rappelle une dénonciation du texte faite le 8 avril dernier par l’ancienne ministre Dominique Voynet, aujourd’hui députée Les Écologistes, dans une interview au quotidien Libération où elle qualifiait cette loi, et son volet durcissant le droit du sol à Mayotte comme étant « un texte dont on ne connaît pas trop les enjeux et qui est un cheval de Troie de l’extrême droite ».
Volets controversés
Face à l'afflux massif d'étrangers en situation irrégulière des Comores, le gouvernement a fait de la lutte contre l'immigration clandestine une priorité. Remettant en cause le droit du sol, supposé pourtant être inaliénable en France, le texte durcit les conditions d'accès au séjour, centralise les reconnaissances de paternité à Mamoudzou, augmente les peines pour reconnaissance frauduleuse de paternité et facilite aussi les expulsions de bidonvilles, rapporte la presse française.
Le volet sécuritaire prévoit des régimes juridiques spécifiques tout aussi controversés tels que le renforcement des contrôles sur les armes, la lutte accrue contre l'emploi d'étrangers sans titre et le retrait possible des titres de séjour aux parents d'enfants considérés comme menaçant l'ordre public.