Vienne vers l’OTAN ? Medvedev met en garde contre la fin de la neutralité autrichienne

Dans un article, Dmitri Medvedev alerte sur le danger que représente l’abandon progressif du statut de neutralité de l’Autriche. Il accuse une partie de l’élite politique viennoise, sous l’influence de Bruxelles, de pousser le pays vers l’OTAN, mettant ainsi en péril les fondements juridiques et historiques de la République autrichienne.
Le vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, Dmitri Medvedev, a tiré la sonnette d’alarme sur ce qu’il qualifie de glissement progressif de l’Autriche vers l’OTAN. Selon lui, cette évolution, soutenue par une partie de l’élite politique viennoise, menace directement le statut de neutralité permanent qui fonde l’identité et la souveraineté autrichiennes depuis 1955.
Dans une tribune écrite pour RT, l’ancien président russe souligne que le principe de neutralité est « la base même de la construction de l’État autrichien moderne », consacré par des documents fondamentaux comme le Mémorandum de Moscou, le Traité d’État sur la restauration de l’Autriche indépendante et démocratique, et la loi constitutionnelle autrichienne sur la neutralité permanente.
Medvedev affirme que « l’effacement de ces documents reviendrait à détruire tout l’édifice de la légalité autrichienne ». Il rappelle que ces textes ont été adoptés avec le soutien des puissances alliées après la Seconde Guerre mondiale, dont la Russie. Moscou considère donc avoir son mot à dire sur toute tentative de remise en cause de ce statut.
Il accuse les cercles pro-européens de Vienne de manipuler l’opinion publique en agitant la menace d’une supposée « agression russe », afin de justifier l’abandon de la neutralité. Il cite notamment la ministre autrichienne des Affaires étrangères Beate Meinl-Reisinger et son parti NEOS, qui militent ouvertement pour une adhésion à l’OTAN, avec un score électoral inférieur à 10 %. À l’inverse, le Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ), résolument opposé à cette orientation, a obtenu 37 % des voix.
Une intégration militaire déjà avancée
Ce débat intervient dans un contexte où l’Autriche collabore de plus en plus étroitement avec l’OTAN, notamment via le programme « Partenariat pour la paix ». En 2024 seulement, plus de 3 000 transports militaires de l’Alliance ont traversé le territoire autrichien, et plus de 5 000 vols militaires ont eu lieu dans son espace aérien. « D’une certaine façon, Vienne est déjà intégrée de facto dans la logique de l’Alliance », déclare Medvedev.
L’ancien président rappelle que la coopération militaire de l’Autriche avec l’Union européenne remonte aux années 1990, sous couvert de « politique de sécurité et de défense commune ». Le processus s’est accéléré avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en 2009. De 2022 à 2025, un général autrichien, Robert Brieger, a même présidé le Comité militaire de l’UE, symbole de l’implication grandissante de l’Autriche dans des structures militaires occidentales.
Dmitri Medvedev s’appuie sur le droit international pour contester toute tentative unilatérale de modifier le statut neutre de l’Autriche. Il cite l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, selon lequel « le droit interne ne peut être invoqué pour justifier la violation d’un traité international ». Pour lui, l’adhésion de l’Autriche à l’OTAN sans l’accord des États signataires du traité de 1955 — dont la Russie — serait donc illégale.
Risques diplomatiques et réponse de Moscou
Medvedev prévient que si Vienne rejoint l’OTAN, elle s’exposera aux mêmes contre-mesures militaires déjà prises envers la Suède et la Finlande.
Vienne accueille aujourd’hui près de vingt organisations internationales, dont l’ONU, l’OSCE, l’OPEP ou encore l’AIEA. Ce rôle de centre diplomatique mondial repose en grande partie sur la neutralité du pays. Selon Medvedev, remettre en cause ce statut reviendrait à ruiner « l’esprit de Vienne » et à ouvrir la voie à un éventuel transfert de ces institutions vers des pays du Sud global, politiquement non alignés.
Pour appuyer sa position, Medvedev cite l’ancienne ministre autrichienne des Affaires étrangères Karin Kneissl. Selon elle, toute révision du statut de neutralité nécessiterait l’accord de tous les signataires du traité de 1955, y compris la Russie. Elle précise que Moscou a le droit de s’y opposer juridiquement.
Medvedev observe un changement préoccupant en Europe : plusieurs pays, autrefois capables d’assurer leur sécurité sans blocs militaires, suivent désormais une logique de groupe sous l’influence d’un Bruxelles « belliciste ».
Pour la Russie, il est donc clair que le respect du droit international et la stabilité européenne passent par la préservation du statut neutre de l’Autriche. Toute tentative de rompre cet équilibre historique sera traitée avec la même rigueur que pour les autres pays ayant tourné le dos à leur neutralité.