Accord sur les terres rares : Kiev craint de se faire rafler la mise
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Zelensky aurait refusé de signer un accord sur l'utilisation de minéraux ukrainiens par les États-Unis en compensation de l'aide américaine déjà fournie, a rapporté AP News. Les États-Unis, frustrés de ne pouvoir rentabiliser leur aide, regrettent cette décision. Aucun compromis n'a encore été trouvé.
Lors d’un échange en marge de la Conférence de Munich sur la sécurité le 15 février, Volodymyr Zelensky aurait prié ses ministres de ne pas parapher un projet d’accord censé offrir aux États-Unis un accès aux terres rares de l’Ukraine, jugé par lui peu convaincant en matière de garanties de sécurité, a rapporté AP News. Le texte, apporté mercredi à Kiev par le secrétaire américain au Trésor, Scott Bassent, faisait la part trop belle aux intérêts américains et ne fournissait aucune garantie de sécurité concrète en retour à l'Ukraine, d’après l’agence de presse américaine qui cite ses sources.
«Je n’ai pas permis aux ministres de signer l’accord concerné, car à mon avis, il n’est pas à même de protéger nos intérêts», a déclaré Zelensky à l’Associated Press, exprimant son désaccord avec cette position.
Le document présente l’exploitation de ces minerais, cruciaux dans l’aéronautique et le nucléaire, comme une forme de compensation pour l’aide déjà envoyée en Ukraine durant la présidence de Joe Biden et comme un moyen de financer de futurs soutiens.
Brian Hughes, porte-parole du Conseil de sécurité nationale américaine, a estimé que cet accord permettrait aux contribuables américains de «récupérer leur mise», toujours selon AP News. Il aurait qualifié la décision de Zelensky de «trop courte vue».
Plusieurs officiels ukrainiens, cités par l’agence américaine sous couvert d’anonymat, ont rappelé que l’administration Trump exprimait un vif intérêt pour ces terres rares afin de réduire sa dépendance envers la Chine, mais qu’à leurs yeux, il serait mal avisé de mettre la charrue avant les bœufs sans engagement formel. Pour l’heure, personne ne s’avance à dire si un compromis verra le jour.
Le ministère ukrainien de la Protection de l'environnement et des Ressources naturelles indique que le pays possède 5 % des réserves mondiales de «matières premières critiques», y compris les éléments de terres rares. Les terres rares sont un groupe de 17 métaux, dont 15 lanthanides, ainsi que le scandium et l'yttrium.
L'US Geological Survey répertorie 50 minéraux critiques pour l'économie et la sécurité nationale. Sa liste comprend le manganèse, le lithium, le titane, le nickel, le graphite, le béryllium et d'autres.
L'Ukraine est un fournisseur clé de métaux des terres rares, dont le titane, le lithium, le béryllium, le manganèse, le gallium, l'uranium, le zirconium, le graphite, l'apatite, la fluorine et le nickel. Elle possède d'importantes réserves de métaux non ferreux : cuivre (quatrième en Europe), plomb (cinquième), zinc (sixième), argent (neuvième). Des gisements de nickel (215 000 tonnes) et de cobalt (8 800 tonnes) sont situés dans les régions de Kirovograd et de Dniepropetrovsk, qui n'ont pas été touchées par les combats. Les réserves de graphite représentent 20 % du total mondial.
Le territoire ukrainien possède les plus grandes réserves de titane d'Europe (7 % des réserves mondiales). Les minerais de titane sont essentiels pour les industries aérospatiale, médicale, automobile et marine.
Depuis le début de l'opération militaire spéciale, l'Ukraine a perdu le contrôle de deux de ses quatre gisements de lithium.