Conflit en Ukraine : «En fin de compte, il faudra parvenir à un accord», souligne Vladimir Poutine
S'adressant à la presse ce 9 décembre à l'issue d'une réunion du Conseil économique suprême eurasiatique, le chef d'Etat russe a tenu à rappeler que son pays était ouvert à la sortie du conflit en Ukraine par la voie d'un accord.
«En fin de compte, il faudra parvenir à un accord. J'ai dit à plusieurs reprises que nous étions prêts à cet accord : nous sommes ouverts», a déclaré le président russe Vladimir Poutine au sujet du conflit en Ukraine toujours en cours, lors d'une conférence de presse ce 9 décembre à Bichkek, après une réunion du Conseil économique suprême eurasiatique. Le dirigeant a néanmoins ajouté : «Mais tout ça [la méfiance] nous fait évidemment réfléchir à qui nous avons affaire.
En fin de compte, il faudra parvenir à un accord. J'ai dit à plusieurs reprises que nous étions prêts à cet accord : nous sommes ouverts
Une semaine auparavant, le 2 décembre, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov avait réaffirmé que Vladimir Poutine «a toujours été et reste ouvert aux négociations». L'officiel russe avait rappelé les tentatives du président d'engager «des négociations sur la base de projets préparés avec les Etats-Unis, l'OTAN et l'OSCE» avant le déclenchement de l'offensive en Ukraine. «Cette initiative n'a pas eu de réponse», avait déploré Dmitri Peskov, estimant que la meilleure façon d’assurer les intérêts russes passait «par le biais de moyens diplomatiques pacifiques».
Le président américain Joseph Biden – dont le pays aide activement Kiev – s'était quant à lui dit «prêt» le 1er décembre à parler avec Vladimir Poutine si ce dernier «cherche un moyen de mettre fin à la guerre», fixant comme première condition un retrait des troupes russes. Le même jour, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov avait reproché à demi-mots à Washington de tenir un double discours : d'un côté vouloir discuter des questions de stabilité et de sécurité avec Moscou, d'autre part expliquer que la Russie doit être battue en Ukraine et «inonder» Kiev d'armes.
Kiev accusé de rejeter toute proposition de négociation
Autre hic majeur : mi-octobre, Vladimir Poutine avait accusé Kiev de «rejette[r] toute proposition de négociation».
En tout état de cause, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fermé la porte à toute négociation avec son homologue russe en signant un décret début octobre qui rend «impossible de mener des pourparlers avec le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine». Pour autant, le président Zelensky a déclaré que son pays était favorable à «des négociations avec la Russie, mais avec un autre président». Ce décret ukrainien a été produit dans la foulée du rattachement à la Fédération de Russie de régions que l'Ukraine considère comme siennes, après l'organisation de référendums locaux auxquels Kiev et ses alliés occidentaux contestent toute légalité.
S'exprimant également ce 9 décembre à propos de l'opération militaire russe en Ukraine – lancée, pour rappel, en février dernier – Vladimir Poutine a affirmé qu'elle «sui[vait] son cours»: «Tout est stable», a-t-il assuré. Enfin, le dirigeant russe juge que «le processus de règlement dans son ensemble ne sera probablement pas facile et prendra du temps» et que tous les participants à ce processus devront «admettre les réalités qui se produisent sur le terrain».
Accords de Minsk utilisés pour faire gagner du temps à Kiev selon Merkel : Poutine répond
Vladimir Poutine a enfin évoqué les propos de l'ancienne chancelière allemande Angela Merkel, qui a confié dans une interview à Die Zeit le 7 décembre que les accords de Minsk (conclus en 2015, officiellement pour mettre en place un cessez-le-feu entre Kiev et les Républiques du Donbass) avaient été une «tentative» de donner le temps à l'Ukraine de renforcer son potentiel militaire en vue d'une confrontation future avec la Russie.
«Il s'avère que personne n'allait mettre en œuvre tous ces accords de Minsk», a-t-il souligné, rappelant que l'ancien président ukrainien Petro Porochenko avait lui-même avoué n'avoir eu aucune intention de respecter les accords lorsqu'il les a signés.
«J'espérais encore que les autres parties prenantes à ce processus étaient sincères avec nous. Il s'avère qu'ils nous trompaient aussi. Il s'agissait uniquement de renforcer l'Ukraine avec des armes, en la préparant aux hostilités», a déploré le chef d'Etat russe. Il a ensuite estimé qu'au vu de ces nouveaux éléments, Moscou aurait «peut-être» dû lancer son opération militaire en Ukraine plus tôt, ajoutant : «C'est juste que nous espérions pouvoir encore parvenir à un règlement [du conflit dans le Donbass] dans le cadre de ces accords pacifiques de Minsk.» Vladimir Poutine estime néanmoins que ces révélations renforcent le bien-fondé de l'offensive russe : «Ce qu'on a dit maintenant prouve seulement que nous avons pris la bonne décision en lançant une opération militaire spéciale.»
La Russie a en effet lancé une offensive en Ukraine fin février avec pour objectif de protéger les populations des Républiques de Donetsk et de Lougansk (désormais rattachées à la Fédération de Russie), cibles des bombardements de Kiev depuis 2014, en «démilitarisant» et «dénazifiant» le gouvernement ukrainien.
Enfin, Vladimir Poutine a déploré l'impact des déclarations d'Angela Merkel sur la confiance entre Moscou et ses interlocuteurs internationaux. «La confiance est presque inexistante, mais après de telles déclarations, une question de confiance se pose : comment négocier, sur quoi, et s'il est possible de négocier avec quelqu'un, et quelles sont les garanties ?», s'est interrogé publiquement Vladimir Poutine, insistant néanmoins sur la nécessité de parvenir, in fine, à un accord sur l'Ukraine : «Mais tout de même, à la fin, nous aurons à nous mettre d'accord. J'ai déjà dit à plusieurs reprises que nous sommes prêts à négocier, nous sommes ouverts. Mais cela nous fait penser, bien sûr, à qui nous avons affaire.»
Angela Merkel a affirmé dans son interview à Die Zeit que les Accords de Minsk avaient été «une tentative de donner du temps à l'Ukraine». Et l'ancienne chancelière de poursuivre : «[L'Ukraine] a également utilisé ce temps pour devenir plus forte, comme on peut le voir aujourd'hui. L'Ukraine de 2014-2015 n'est pas l'Ukraine d'aujourd'hui [...] Début 2015, Poutine aurait facilement pu les envahir à l'époque. Et je doute fort que les pays de l'OTAN auraient pu faire autant alors qu'ils le font maintenant pour aider l'Ukraine.»