Drapeaux palestiniens sur les mairies : que dit la loi sur la neutralité du service public ?

Au moins 86 mairies ont hissé le drapeau palestinien pour la reconnaissance de la Palestine par la France, mais Bruno Retailleau demande leur retrait au nom de la neutralité publique. La loi interdit de fait aux édifices publics d’exprimer des opinions politiques, a tranché le Conseil d’État en 2005.
Le 22 septembre 2025, au moins 86 mairies françaises, dont celles de Saint-Denis, Lyon, Rennes, Nantes et Besançon, ont hissé le drapeau palestinien pour célébrer la reconnaissance officielle de l’État de Palestine par la France, annoncée par Emmanuel Macron à l’ONU.
À Paris, des élus écologistes l’ont déployé à l’Hôtel de Ville, malgré l’opposition d’Anne Hidalgo, qui avait opté pour une projection des drapeaux palestinien et israélien sur la tour Eiffel. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur démissionnaire, a fermement condamné ces initiatives et mandaté les préfets pour s’y opposer, arguant d’une violation de la neutralité du service public.
Drapeau ukrainien accepté, drapeau palestinien sanctionné ?
Ce principe fondamental, inscrit dans le Code de la fonction publique, impose aux édifices publics de ne pas exprimer d’opinions politiques, religieuses ou philosophiques. Une jurisprudence clé remonte à 2005 : le Conseil d’État a obligé la mairie de Sainte-Anne (Guadeloupe) à retirer un drapeau indépendantiste, affirmant que les mairies ne sauraient servir de tribune partisane.
Les obligations légales sont claires : les bâtiments publics doivent rester neutres, sauf si le pavoisement reflète une position officielle de l’État, comme la reconnaissance diplomatique de la Palestine. Des exemples récents illustrent ces tensions. À Malakoff (Hauts-de-Seine), le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a ordonné le retrait du drapeau palestinien, assorti d’une astreinte de 150 euros par jour de retard, malgré le maintien par la maire communiste.
À Strasbourg, une illumination aux couleurs palestiniennes a été interdite a posteriori. En comparaison, le drapeau ukrainien a été validé en 2024 comme geste de solidarité nationale, et le drapeau israélien après les attaques du 7 octobre 2023, distinguant solidarité internationale d’opinion partisane.
Les tribunaux administratifs ne traitent pas toutes les saisines en urgence, laissant une marge d’interprétation. Les risques pour les maires sont financiers : astreintes si le drapeau persiste, mais aucune sanction si retiré rapidement. Cette affaire met en lumière la complexité juridique : entre devoir de neutralité et expression de solidarité diplomatique, les décisions varient.
Elle reflète les divisions politiques post-reconnaissance palestinienne, avec une droite mobilisée contre ces symboles et une gauche les défendant comme un acte légitime. Sans recommandation formelle, les tribunaux invitent à une prudence accrue pour éviter les contentieux, soulignant que la loi privilégie la neutralité pour préserver la confiance publique.