Inéligibilité de Marine Le Pen : François Bayrou ouvre la porte à une «réflexion» sur l’exécution provisoire

Ce 1er avril devant les députés, le Premier ministre français a estimé qu’une «réflexion» devait être menée sur l’exécution provisoire des peines. Cette dernière empêche la suspension d’une peine de première instance, y compris en cas d’appel, et compromet fortement une candidature de Marine Le Pen à la présidentielle de 2027.
«Je considère que pour vous la réflexion doit être conduite», a déclaré ce 1er avril aux députés le Premier ministre François Bayrou, à propos de l’exécution provisoire. «En principe de droit, toute décision lourde en matière pénale doit être susceptible d’appel» a-t-il également souligné, en réponse à une interpellation du chef de file des députés du Parti socialiste (PS), Boris Vallaud.
«Il se trouve que le seul point de l’exécution provisoire fait que des décisions lourdes et graves ne sont pas susceptibles de recours» a poursuivi le chef du gouvernement, déclarant se positionner «en tant que citoyen». Une précision qui a provoqué une bronca à gauche de l’hémicycle.
Ces propos de Bayrou surviennent au lendemain de la condamnation, par un tribunal parisien, de Marine Le Pen dans l’affaire des assistants parlementaires du Front national (rebaptisé depuis Rassemblement national) au Parlement européen, à une peine de quatre ans de prison – dont deux fermes aménageables sous bracelet électronique –, à une amende de 100 000 euros, mais surtout à une peine de cinq ans d’inéligibilité avec effet immédiat. Un verdict qui vient fortement compromettre une participation de la favorite dans les sondages à l’élection présidentielle de 2027, provoquant une onde de choc politique qui s’est étendue bien au-delà des frontières de l’Hexagone.
Le Premier ministre français a adressé un «soutien inconditionnel aux magistrats», stipulant par ailleurs «ne pas avoir le droit» en tant que chef du gouvernement de «critiquer» une décision de justice. «Il est indiscutable et doit être indiscuté sur ces bancs que les décisions de justice doivent être soutenues et les magistrats protégés dans l’expression de leurs missions» a-t-il martelé.
«C’est le seul pays où on fait ça»
Jusqu’à cette prise de parole au Palais Bourbon, François Bayrou ne s’était pas publiquement exprimé sur la condamnation de Marine Le Pen, ainsi que de huit autres députés européens et douze assistants parlementaire du parti à la flamme, pour détournement de fonds publics.
Néanmoins, la veille de cette intervention à l’Assemblée, l’entourage du Premier ministre, lui-même inquiété par une affaire similaire à celle du RN, avait confié à une agence de presse française que celui-ci était «troublé par l'énoncé du jugement».
Des propos rapportés qui ont valu au locataire de Matignon une première volée de critiques de la part du PS. «Je suis troublé par le trouble du Premier ministre» a ainsi réagi ce 1er avril sur RTL le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, estimant que le «signe» envoyé par Bayrou «n’est pas le bon». «Quand on est Premier ministre dans une République et qu'on est le gardien de la loi, il faut [...] accepter que les tribunaux puissent être garantis dans leur indépendance» avait quant à lui lancé le 31 mars, sur BFMTV, l’ancien président français (2012-2017) devenu député de la Corrèze, François Hollande.
Une prise de position que François Bayrou aurait réitérée, ce 1er avril au matin, lors d’un petit déjeuner à Matignon avec des députés du bloc centriste. «C’est le seul pays où on fait ça» aurait asséné le Premier ministre, selon des propos rapportés par des participants à la chaîne CNews. Avant même l’énoncé du verdict, toujours dans la lignée de ces confidences dans l’entourage de Bayrou, Le Figaro avait rapporté que ce dernier redouterait un «choc dans l’opinion» si Marine Le Pen ne pouvait pas se présenter en 2027.